Les Aventures RocamBLOGuesques de Simone Poufignol ;) (et oui, j'me lance)

Présentation du personnage:
Simone Poufignol,
Momone pour les intimes, est une femme hors du commun. Ancienne préposée aux PTT, elle a passé sa vie à regarder avec envie, défiler devant ses yeux émerveillés, des cartes postales venues de tous les coins de la planète, sur lesquelles étaient immortalisées toutes sortes de décors exotiques, tous plus dépaysants les uns que les autres. Toute son existence, cette aventurière dans l'âme, cette voyageuse de l'imaginaire n'a rêvé que d'une seule chose: Parcourir le monde et vivre une vie faite d'aventure, de risque et de danger! Une vie fantastique et trépidante, à des années lumière de son quotidien...
Au lieu de cela, emmitouflée dans son éternel châle noir, ses charentaises aux pieds et son chat Pompon endormi sur les genoux, elle reste assise dans son vieux fauteuil mité à regarder sagement, par sa fenêtre entrebâillée, le temps qui s'enfuit à grands pas...
Ses seuls moments d'animation sont quand elle prend le thé avec Mme Moulino, sa gentille voisine atteinte de la maladie d'Alzheimer. Ces jours là, Momone se métamorphose en narratrice enflammée en lui relatant, avec fougue et enthousiasme, les aventures rocambolesques et invraisemblables dont elle aurait été l'héroïne, dans le plus grand secret...
de son imagination.


Dimanche, 16h30, on sonne à la porte. Simone se lève péniblement de son fauteuil et va ouvrir. Moricette est là, sur le paillasson, souriante, comme toujours. Simone s'écarte pour la faire entrer dans le salon, l'aide à quitter son manteau et l'invite d'un geste de la main à aller s'asseoir sur le canapé.
- Installez-vous, j'arrive ! lui lance l'hôtesse qui a déjà filé à la cuisine pour en revenir aussitôt avec un plateau garni de deux grandes tasses et d'une jolie théière en porcelaine. Elle le pose sur la table basse et commence à faire le service.
- Une grande tasse de thé bien chaud, sans lait et avec un sucre, c'est bien cela Moricette ? demande-t-elle à sa voisine. Sans même attendre de réponse, elle saisit un morceau de sucre avec sa pincette en argent et le laisse délicatement tomber dans la tasse de son amie. "Inutile" Pense-t-elle. Elle la connait par coeur sa réplique. Cela fait 38 ans qu'elle l'entend plusieurs fois par semaine.
- Oui, c'est tout à fait ça, répond Moricette dans un sourire. Sans lait et avec un sucre, merci Momone. Et vous, vous ne sucrez pas ?
- Non, merci, pour moi ce sera juste un nuage de lait, dit-elle avec un sourire indulgent. Combien de fois ne s'est-elle pas entendu répéter cette phrase... Des centaines de fois, des milliers peut-être...
- Vous avez vu les nouvelles ? s'inquiète son invitée en reposant la tasse dans sa coupelle. Encore un attentat en Israël ! Cette fois-ci c'est une école qui a été détruite par une bombe...
Elle hoche tristement la tête et ajoute dans un souffle:
- Si c'est pas malheureux...
- C'est vrai que c'est triste, opine Simone. Tous ces attentats, ces bombes, ces victimes... cela me renvoie à de très de mauvais souvenirs...
Moricette la dévisage, l'air étonné et inquiet.Simone continu :
- ... comme le jour où j'ai fait sauté le pont de la Marne, ajoute-t-elle l'air grave mais une lueur de malice dans les yeux.
Sa voisine manque de s'étouffer avec son thé, repose sa tasse et la dévisage les yeux écarquillés.
- Vous dites ?!
Simone feint l'étonnement.
- Comment... je n'vous ai pas raconté ?! Pfff... quelle histoire !
Moricette se cale confortablement au fond du canapé et écoute son amie avec la plus grande attention.

"Si mes souvenirs sont bons, c'était le 25 août 1944. Une importante bataille opposait les Forces françaises de l'intérieur aux soldats allemands. Mes camarades résistants et moi-même avions été envoyés en renfort à Joinville par le Général De Gaulle lui-même. A cette époque, j'étais peut-être la plus jeune du groupe mais sans doute la plus agile et la plus téméraire. C'est donc sans hésitation que notre chef Achille Parmentier me confia la périeuse mission de déposer les charges explosives sur les vieux pilonnes en pierre du viaduc. Les allemands n'étaient plus qu'à une poignée de kilomètres de la ville et il fallait absolument les empêcher d'emprunter ce pont pour venir nous envahir !...
Moricette, sage comme une image, boit littéralement les paroles de sa conteuse pendant que sa tasse de thé refroidit sur la table basse.
- ... Achille Parmentier attendit que la nuit tombe pour nous convoquer au Q.G. afin de préparer ensemble un plan d'action. Après m'avoir fait part du déroulement de l'opération, il demanda à nos compatriotes si certains voulaient bien se porter volontaires pour m'accompagner dans cette lourde tâche car il craignait pour ma sécurité. A mon grand étonnement, tous firent un pas en avant. Je fus bouleversée par tant de solidarité et de loyauté. C'était beau à voir, croyez moi...
- Je vous crois, murmure Moricette les yeux embués.
- ... Mes trois camarades de classe, Ondine Hanville, Félicie Tassyon et Octavie Hébel furent désignées pour m'assister à la pose des dynamites. Quant au reste du groupe, essentiellement composé d'hommes, il fut chargé de nous précéder sur les lieux afin de sécuriser le périmètre. Jean Neymard se posta en sentinelle en haut d'un arbre, le chef Achille se camoufla sur une des berges de la Marne, Geoffroy Aupiet traversa à la nage la rivière glacée pour aller s'embusquer sur l'autre berge et, enfin, Guy Baule se terra dans un fossé qui longeait la route par laquelle l'ennemi allait apparaitre. Après avoir enfilé nos tenues de camouflage et s'être grimé le visage avec du charbon, mes deux camarades et moi-même rampâmes l'une derrière l'autre, à travers les herbes hautes jusqu'à arriver tremblantes aux pieds du grand pont. Nous ne disposions que de très peu de temps avant de voir surgir l'ennemi. Mon coeur battait si fort dans ma poitrine que j'avais l'impression que tout le monde pouvait l'entendre ! Les quelques mètres qui nous séparaient du pont me paraissaient interminables. Tout en rampant dans les herbes mouillées, je répétais de tête la marche à suivre pour réussir ma mission.
"Allons. Pas de panique. Tu fixes les bâtons de dynamite avec le mastic, tu plantes les mèches, tu déroules les fils, tu les branches sur les amorces (le fil blanc... sur le bouton rouge; le fil bleu... sur le bouton vert*... ), puis tu te planques et tu attends... "
Arrivée près du 1er pilonne, je consultai rapidement ma montre à la lueur de la lune et chuchotai à mes deux amies:
- Vite ! Il ne nous reste que quelques minutes avant l'arrivée des boches.
Mes mains tremblaient de peur, de froid... de tout. Mes gestes étaient saccadés et le souffle me manquait atrocement. Malgré cela, je réussis à poser correctement les charges sur les colonnes de pierre. Pendant que Ondine me passait les fils, je jetai un oeil inquiet vers les deux autres jeunes femmes restées tapies dans l'herbe à quelques mètres de nous:
- Comment vont-elles ? Lui chuchotai-je en les désignant d'un signe de la tête.
- C'est pas la joie, me répondit-elle ennuyée... Je crois que Octavie est en train de pleurer... elle est morte de trouille!
- Et Félicie?
- Aussi...
- C'est bon, la rassurai-je, j'ai bientôt fini...
La voix impatiente d'Achille Parmentier se fit entendre au loin:
- Comment ça se passe là-bas, souffla-t-il avec force. C'est bon !?
- Oui chef, répondis-je en accélérant mes gestes, j'ai bientôt terminé !
Soudain, Jean Neymard, perché dans son arbre, nous alarma avec des cris étouffés:
- Les fritz arrivent ! Les fritz arrivent !
Je fis volte-face vers ma camarade:
- Vite, vas rejoindre les filles et filez vous abriter dans le bois !
- Et toi !? m'interrogea-t-elle paniquée.
- J'arrive. Seulement, je risque de vous retarder à dérouler mon fil, alors partez devant, je vous suis. Allez ! lui ordonnais-je comme elle hésitait.

Moricette, médusée, écoute son amie dans un silence religieux. Quant à Simone, elle interrompt volontairement son récit pour se resservir une tasse de thé.
- Et alors, demande la vieille dame qui trépigne d'impatience. Qu'est-ce qui s'est passé ensuite ?
Simone ne bronche pas. Elle fait durer le suspens...
L'air grave, elle verse un nuage de lait dans son thé, remue délicatement, égoutte sa cuillère, porte la tasse à ses lèvres, souffle tout doucement sur le breuvage brûlant et en boit une petite gorgée tout en observant sa voisine du coin de l'oeil.
- Je vous en prie Momone, ne soyez pas si cruelle, supplie Moricette, racontez-moi vite la suite !
- Voilà, voilà, ça vient ! Fait-elle, faussement agacée, ravie de susciter autant d'intérêt et de curiosité chez son amie. Elle repose sa tasse sur sa coupelle et reprend aussitôt son récit.

"Tandis que les camions allemands commençaient à emprunter le pont, mes camarades, Ondine, Félicie et moi, allâmes nous cacher dans le petit bois qui longeait la rivière. Malgré mes tremblements incessants, je réussis à brancher rapidement les fils sur les amorces. Alors que j'attendais l'ordre de déclencher la bombe, j'entendis la voix forte de notre chef sortir de derrière un buisson:
- FEU !! ...
Simone a crié ce mot si fort que Moricette en a sursauté de peur.
- ... Je saisis la manette à deux mains, fermai les yeux et l'abaissai de toutes mes forces. Dans un vacarme assourdissant, le pont vola en éclat... Des centaines de pierres, de bouts de ferraille et de morceaux en tout genre tombèrent un peu partout autour de nous. Nous étions entourés par un épais nuage de poussière qui ne nous permettait même pas de voir à 50 centimètres devant nous. Nous dûmes donc attendre de longues minutes dans un silence pesant avant que celui-ci ne se dissipe. C'est là que nous avons vu l'étendu des dégats. Le pont était totalement détruit. Les deux camions remplis de soldats allemands étaient en morceaux et des corps déchiquetés flottaient à la surface de la rivière. C'était un spectacle affreux... Ils étaient tous morts. Le pire, c'est qu'il y avait des victimes aussi de notre côté.
- Mon dieu, souffle Moricette une main tremblante devant la bouche.
Simone sort son mouchoir en dentelle de la poche de son tablier, essuie une fausse larme au coin de son oeil et se mouche bruyamment.
- ... Les charges explosives étaient bien trop grosses pour un pont comme celui-ci, et nos hommes ne s'étaient pas assez éloignés quand la bombe a explosé. Geoffroy Aupiet fut écrasé sous l'eau par un morceau du pont et mourut noyé; Guy Baule reçu la carcasse d'un camion en feu et perdit ses deux jambes, avant de succomber cinq jours plus tard d'une gangrène; Jean Neymard, soufflé par l'explosion, fut projeter de l'arbre où il était en sentinelle et se brisa la nuque en tombant; quand à notre chef Achille Parmentier, il était sain et sauf.
Moricette pousse un soupir de soulagement.
- ... Mais il mourut quelques jours plus tard en marchant sur une mine qui en fit de la viande hachée...
- Comme c'est triste, fait Moricette en hochant la tête.
- ... Quant à mes camarades Ondine Hanville, Félicie Tassyon, Octavie Hébel et moi-même, nous fûmes décorées de la médaille du courage par le Général De Gaulle en personne.
- Oh! quel honneur! Félicitations! s'écrie joyeusement Moricette en battant des mains.
- Quelques années plus tard, mon mari et moi sommes retournés sur les lieux. Le pont a été reconstruit. D'ailleurs, Marius m'a prise en photo alors que je pose devant...
- Vous voulez bien me la faire voir !?
- Quoi, la photo? bien sur, elle doit être quelque part dans mon vieil album, dit-elle en faisant mine de se lever.
- Mais non, s'indigne Moricette, votre médaille voyons ! Vous l'avez déjà oubliée !?
Simone hausse les sourcils. Elle n'avait pas pensé à ce petit détail. Elle se ressert nerveusement une tasse de thé et bafouille:
- C'est que... je ne l'ai plus...
Son amie la dévisage incrédule. Simone, mal à l'aise de devoir improviser se racle la gorge.
- ... Il se trouve que... hum... je l'ai donnée... à une oeuvre de charité. Et bien oui, comprenez-moi, se gargarise Simone en prenant l'air héroïque, ils avaient besoin d'argent pour pouvoir construire un orphelinat qui allait accueillir tous les enfants victimes de la guerre; alors, n'ayant pas d'argent, j'ai fait don de la seule chose de valeur que j'avais: ma médaille.
Moricette se pince les lèvres sous l'émotion.
- Momone, vous êtes trop bonne. Vous êtes une héroïne...
Simone hausse les épaules, l'air modeste.
- Mais non voyons... n'importe qui en aurait fait de même.
- Et bien dites-moi, quelle affaire ! Touts ces événements m'ont donnée soif, s'exclame Moricette en lui tendant sa tasse.
Simone la rempli de thé chaud et y glisse un morceau de sucre avant de se servir à son tour.
- Et vous, s'étonne la vieille dame, vous ne sucrez pas?
- Toujours pas non, soupire Simone en remuant son thé d'une main énergique qui cache mal son agacement.
Elle a beau se dire que cette pauvre Moricette a la maladie d'Alzeihmer et qu'elle ne le fait pas exprès, elle reconnait honteuse que, quelques fois elle doit se faire violence pour ne pas l'envoyer balader.
- A part cela, Moricette, qu'avez-vous de beau à me raconter ?
La vieille dame se creuse la tête puis déclare, après un long moment de réflexion:
- Ah oui ! vous avez vu les nouvelles ?! Encore un attentat en Israël...
- ...

EXTRA !!!!
Mais c'est génial !!!
La suite la suite !!!
^^

Je connaissais...
J'aime toujours autant Simone! Il y a quelque chose qui me plait énormément dans tes textes, c'est cette sorte de dérision.
Et en plus, une référence à ce chef d'oeuvre : La 7ème Compagnie, que demander de plus?

J'avoue c'est drôle v_v
lol
J'adore cette Momone. Si j'étais vieille et que j'avais un chat, je lui ressemblerais sûrement un peu.. ^^
Très bien écrit en tout cas. C'est fluide, léger.. C'est long mais ça ne le parait pas !
Bravo !

Ah oui, génial, j'me suis bien amusée!
Rien que les noms valent le détour (Et Félicie... aussi )
J'suis déjà fan de Momone et son imagination, et de son amie qui l'encourage dans ses histoires.
J'en redemande

C'est tout simplement...génial
J'ai bien rigolé en lisant ce texte^^
cette Momone...c'est quelque chose^^
Très bon récit...Vivement la SUITE!!

J'adore! La façon que tu as de raconter cette histoire, on a envie d'aller jusqu'au bout lire la suite ! Et puis les jeux de mots avec les nom sont vraiment bien trouvés (Jean Neymard, Octavie Hébel...) Encore bravo !

rolalaah merci ! c'est trop gentil! quel accueil!
j'en suis toute bouleversifiée!!
je suis en train d'écrire une autre aventure de Simone. La première partie est déjà en ligne sur la dernière page de mon blog.
ici---> http://histoire-rocambloguesque.skyrock.com/
merci de me donner votre avis dès que possible!
bisous!

mdr c'est énorme comme texte ! En plus c'est trop bien écrit !
vivement la suite !!

Han ! Je viens juste de remarquer que c'est "rocamBLOGuesque" !!!!!!
J'suis choquée comme j'suis nulle d'avoir pas vu plus tôt xD
En tout cas joli jeu de mot !

bein oui! c'est RocamBLOGuesque et pas Rocambolesque!
comment!!!???
t'avais pas vu mon super jeu de mot !!??
bon allez, c'est pas grave! vieux motard que jamais.... heu... mieux vaut tard que jamais (ça devrait aller au rayon des contrepèteries ça non?! )

Elle aime énormément votre humour ô déesse Erutirce....Toujours, vous la faite sourire et parfois franchement rire. Merci.

M.K