Dans le sud-ouest de la France, une brise venant de l’Atlantique s’engouffra dans le hall du lycée lorsqu’un élève tenait la porte à son amie. Dans les couloirs, des lycéens se promenaient mollement vers leurs premières heures de cours.
Éternelle était déjà adossée au mur tout près de la salle où elle devait avoir Français dans une dizaine de minutes. Face à elle, lui adossé contre la fenêtre, Raphaël le meilleur ami de l’Éternelle la fixait, une moue anxieuse sur ce visage d’ange.
Son intuition lui avait donné raison ; Éternelle ne va pas bien. Depuis le début de la semaine, elle avait radicalement changé. Passant de la délurée joyeuse et euphorique à une fille des plus sérieuse, troquant les lentilles pour ses vieilles lunettes avec ce regard perdu fixant le vide.
Le matin, au lieu du grand « SALUT ! Ça va ?! » Crier tout fort sans discrétion et du gros câlin du matin, il y avait le droit à un simple « Salut » à peine murmurer.
Avant, les très longs cheveux noirs de l’Éternelle étaient toujours lâchés, elle les ramenait des fois sur son épaule gauche, mais maintenant elle les attachait en chignon. Elle était toujours aussi belle, mais ce n’était pas l’Éternelle de Raphaël. Même sa peau légèrement rose d’hiver avait laissé place à un teint plus blanc que blanc.
Et ce qui lui manquait le plus : son éternel sourire de joie.
Cela faisait cinq jours ça durait, il l’avait laissé pour voir si cela passait tout seul. Aujourd’hui, il avait décidé de lui demander car on était en veille de vacances et il fallait qu’il sache.
Raphaël s’approcha de l’Éternelle qui semblait fixer le sol.
- Éternelle, ça va ?
Elle leva les yeux. Le soleil avait réussi à échapper aux nuages, sa lumière était pure et chauffait le dos de Raphaël.
- Bien Raphaël. Et toi ? Renvoya-t-elle par politesse.
- Non, ça ne va pas.
- Qu’es-ce qu’il y a mon ange ?
Elle s’était rapprochée de son ami, levant le visage devant Raphaël qui devait la dépasser de deux têtes. Il regretta d’avoir dit cela car il pouvait voir dans les yeux gris nuages de son amie une sincère inquiétude, malgré cela il ne put s’empêcher de répondre :
- Tu me mens, ne le ni pas, lança-t-il d’une légère froideur. S’il te plait.
L’Éternelle plaqua son dos contre le mur, le regard fuyant. Aux creux de ses paupières quelques larmes commençaient à se former.
Ne lui dis rien, garde ça pour toi.Elle tacha d’avoir un regard froid et fit face à Raphaël qui la fixait de son haut.
- Tu me mens, je le sais. Tu ne vas pas bien, pas du tout… Je suis ton meilleur ami, tu sais bien que tu peux tout me dire. Tout le monde serait aveugle pour ne pas remarquer ton changement. Alors dis-moi tout, pourquoi es-tu triste ?
- Je ne suis pas…
De nouveau, elle eut le regard fuyant.
- Je ne… sais pas.
Croisant ses bras sur son torse, Raphaël attendit.
- Bon ! D’accord, s’énerva l’Éternelle, elle prit un court instant pour réfléchir en rabattant une mèche derrière son oreille gauche.
1. Je suis moche.
2. J'en ai marre.
3. Je pleurs et ça craint.
4. Je hais l'humain.
5. Je suis idiote.
6. Je t'en veux de t'être moqué de ma peinture.
7. J'ai envie de changé d'air.
8. Tu m'énerves et tu es d'un exaspèrent affligeant.
9. Je t'aime.
10. TU m'énerves vraiment et fait attention à ce que tu vas dire, je te préviens.
- Mais moui aussi je t’aime ! Répondit Raphaël, comme la plupart du temps, pour rire.
Furibonde, l’Éternelle lui donna un coup de pied dans le tibia avant de rentrée dans la salle de classe, ignorant le bonjour de son professeur.
Elle alla se placer au fond de la classe, loin de Raphaël qui s’était installé à deux rangs d’elle, faute de places. Écoutant vaguement le professeur, elle fixait le tableau de ce regard vide et songeur. Quand un bout de papier froisser atterrit sur sa table. En tournant la tête vers l’expéditeur elle vit Raphaël murmurer un « Yes » en signe de réussite.
En levant les yeux au ciel, elle déplia soigneusement le mot.
Tu es magnifique, la plus belle créature sur Terre, l'Éternelle dans toute sa splendeur. Tu n'es pas idiote, mais moi je suis le diablotin imbécile qui te sert d'ami. Tes peintures sont magnifiques, je suis simplement con.
Mais dis-moi la vérité, ce n'est pas pour ça que tu es triste ? Je te connais, et cela fait des années que tu penses ses idioties.
Je veux la vérité, je t'en prie.
Je croyais que l'Éternelle était éternelle.
(P-S : tu fais mal !)Elle leva la tête, il la regardait. L'Éternelle fixa à nouveau le mot, elle arracha une page de son brouillon et rédigea ce petit mot :
Je ne sais pas Raphaël. Vraiment, j'ai juste perdu quelque chose. Désolée, si tu ne veux plus me parler je comprendrais. Éternelle n'est qu'un prénom, mon ange déchu.Pliant vaguement le papier, elle le fixa, puis fit passer la missive jusqu’à l’ange de son cœur.
C’est qu’ils s’aimaient, mais Raphaël ne l’avait toujours pas compris. Éternelle essayait bien de lui faire comprendre, il n’avait toujours pas remarquer.
Quel idiot !Une fine couche de nuage venait à présent marchait recouvrir le ciel. Après les cours, Raphaël raccompagna l’Éternelle chez elle. Il marchait à reculons face à son amie.
- Qu'es-ce que tu as perdu Éternelle ?
- Je n'ai pas envie d'en parler, juste oublier.
- Bien. Et si je te chatouillais ?
- Tu n'as pas...
Trop tard, elle courra, mais il l'attrapa et se mit à la chatouiller, il l'entraîna vers un banc où ils rirent de bon cœur.
Son rire... cela avait tellement manqué son amour, un rire franc suivit d'une magnifique sourire sur ses lèvres. Son teint était un peu plus rose et ses yeux pétillaient de nouveau. Il avait réussi, à son insu, à de lui faire oublier cette chose qu'elle avait perdue.
- Sérieusement ? Je t'exaspère à ce point ?
- Oh que oui, mais je t'aime comme ça. Ne change pas pour moi, si je n’avais pas aimé je t’aurai déjà donné une bonne centaine de claques.
En lui ébouriffant les cheveux, elle perdu son sourire et se mit debout.
Raphaël. Je t'aime tellement... si tu savaisII
Dix raisons de t’aimer
La nuit s’en allait déjà, chassée par le soleil. Dans sa chambre, Éternelle écrivait une lettre à son amour, autour d‘elle toute ses affaires étaient déjà emballées.
Raphaël,
Je t'écris pour te dire que je pars dans une autre ville. Je suis désolée de te l'annoncer par lettre, je n'aurai pas eu le courage de t'affronter. Je te connais mon ange, tu m'aurais supplié, puis tu te serais fâché et j'aurai cédé.
Il y a aussi une chose, je t'aime, je veux dire je suis amoureuse de toi. Voilà dix raisons de t'aimer mon ange.
1. Ton sourire.
2. Ta façon de me faire rire.
3. Tu es l'homme de mes rêves.
4. Tu m'exaspères et le fait que j'aime ça.
5. Tes yeux qui remarque tout ce qui ne va pas.
6. Ton écriture, la façon dont tes mots s'enchaînent.
7. Tes beaux cheveux blonds en bataille qui me font craquer.
8. Ton odeur, la lavande que met ta mère dans la lessive et la petite pointe de toi.
9. Ta voix qui me susurre souvent mon prénom, qui restera à jamais dans ma mémoire.
10. Je t'aime.
Ton Éternelle.C’était quelques jours avant Noël…
III
Je t’aime, pardonne moi…
Les jours passaient, puis les semaines…
Il n’y a pas un instant je ne cesse de penser à toi, Éternelle.Allongé au travers de son lit, Raphaël tenait du bout des doigts la lettre de l’Éternelle. L'espiègle Raphaël était devenu un ange qui ne volait plus. Un ange triste, brisé.
Le souvenir des mots de l'Éternelle le hantait, son souvenir venait lui pincer le ventre. Il la connaissait si bien...
Il savait qu'elle se touchait l'oreille gauche lorsqu'elle mentait, que quand elle était nerveuse l'Éternelle se passait une main dans les cheveux... Ces petites choses qu'il était le seul à voir et remarquer. Raphaël s'était rendu compte ses dernières semaines qu'il était amoureux d'elle. Son Éternelle.
Il fixant le plafond de sa chambre, quand quelqu'un toqua à sa porte et glissa une petite lettre par dessous.
De son lit, Raphaël observa qu'une perce-neige était peinte sur l'enveloppe, c'était la signature de son Éternelle. Il fixa longuement la lettre, puis se leva un peu engourdit.
Dans cette petite enveloppe il y avait un peu d'espoir.
Ramassant le papier aux dessins délicats, il se perdit à nouveau dans la contemplation de cette simple lettre.
Ouvrant l'enveloppe, il la jeta sur son bureau et lu les mots de son Éternelle.
Raphaël,
Je t'écris pour avoir les choses au clair. Déjà je ne suis aucunement parti à cause de toi, d'autres raisons m'ont incitée à partir.
Tu me manques terriblement.
Je voulais savoir, M'aimes-tu ? Je veux dire, es-tu amoureux de moi ?
Ton Éternelle
Ma chère Éternelle,
Oui, je t'aime, je suis amoureux de toi. Je m'en veux d'avoir été si idiot.
Je t'en supplies reviens, ou c'est moi qui reviendrai.
Je t'aime, ma fleur immortelle, mon rayon de soleil, mon arc-en-ciel, mon amour aux milles merveilles.
Ma belle.
Ton ange plus que raté,
Raphaël
Vers trois heures du matin, deux jours plus tard, Raphaël reçu un texto sur son portable.
Impossible de reposer le pied dans cette ville, mon ange déchu. Je suis en vacances =p
Je t'aime, Éternelle.Bien réveillé, il s'habilla à la hâte, prit quelques vêtements, ses économies sous son matelas et partit en laissant un mot à ses parents.
IV
Comédie
La nuit de février était glacée, particulièrement à Reims. Dans l'obscurité volé par les lampadaires, un être blond s'avançait d'un pas joyeux vers le domicile de son Éternelle.
Tout euphorique, il sonna face une porte, rue Chabaud.
Dans son lit, Éternelle faisait un songe étrange. Elle se promenait dans une rue en pleine nuit car elle adore le calme de la nuit. Mais soudain, quelqu’un la tire par la taille et l’emmène dans une voiture, elle ne voit rien, elle est terrifiée. En veut-on à ses parents fortunés ? Non, ils veulent autre chose. Elle s’évanouit ou s’endors, elle n’en sait rien. Elle sent simplement quelque chose la souillée.
Le soleil se lève… Elle se réveille, sous sa jupe plus de collant, ni de culotte. Soudain elle comprend…
Et l’Éternelle sursauta sortant d’un songe qu’elle a vécu, puis revenue à travers ses cauchemars. Elle ne l’avait dit à personne, trop humiliant.
Passant sa main dans des longs cheveux noirs pour dégager quelques mèches, elle regarde l’heure.
5 heures 44Son long soupir fut interrompu par la sonnette de l’entrée. Susautant de nouveaux, elle porta sa main à son cœur et se dirigea vers la petite entrée.
- Tu es fou ! Et si mes parents étaient là ? Murmura Éternelle face au sourire beat de Raphaël.
- Voyons, tout le monde sait que de Janvier à Mars tes parents partent en vacances te laissant seule chez toi !
Il était heureux et bomba le torse comme un jeune écolier qui venait de répondre à une bonne question. Raphaël s’approcha de son Éternelle la prenant par la taille, elle, toujours furieuse résista un temps, avant de s’abandonner à lui. Un long premier baiser suivit.
- Tu es un fou, Raphaël Alexander Francher.
- Je sais, qui n’est pas fou lorsqu’il aime ?
- En tout cas, tu termineras ta nuit sur le canapé.
Elle se retint de lui tirer la langue et se dirigea vers la penderie prendre des draps. Mais il l’attrapa de nouveau avec plus de force.
- Et pourquoi n’aurais-je pas le droit à être près de toi ? Je ne ferais rien promis.
- Tu es déjà assez près, déclara-t-elle en se dégageant. Puis puisque Monsieur ne peux s’empêcher de risquer sa vie…
- Mademoiselle s’est trop éloigné de moi, je ne pouvais plus attendre. Tu me manquais trop.
- Bien cela ne change pas, Monsieur dormira sur le canapé. Puis il est très…
Raphaël l’embrassa de nouveau. Elle céda sans rien dire.
Elle s’endormit dans ses bras, comme promis il ne fit rien.
Quatre jours plus tard…
Les deux amoureux se promenaient dans les paysages épurés d’hiver. Main dans la main, ils allaient bientôt se dirent adieu. Hier, c’était leur première fois ensemble, mais Raphaël devait rentrer, il avait promit en chassant les larmes de son Éternelle :
- Dans quelques semaines, quand j’aurai ma majorité, je reviens vivre avec toi.Mais il n’eut jamais cette occasion…
V
Je t’aime, au revoir…
Le printemps approchait lentement avec une petite pointe de chaleur. Éternelle et Raphaël attendaient les week-ends avec impatience, car c’était une occasion de ce voir.
Éternelle était assise sur la cuvette des toilettes, regardant le test de grossesse.
PositifElle voulait en être sûre, depuis quelques jours elle avait des douleurs dans le ventre et plus de menstruations. Bien sûr, il était normal d’avoir des retards… mais elle voulait en être sûre.
Sous le choc, elle se dirigea dans sa chambre et écrit cette ultime lettre à son amant :
Raphaël,
Je ne t’aime plus. Je pense que c’est pour cela que je te quitte, mon corps n’est plus à moi. Je suis enceinte de mon violeur.
Ne pense plus à moi, chasse-moi de ton cœur je n’ai rien à faire. Je t’ai trompé avec beaucoup d’autres hommes, tu n’étais pas le seul ce dernier mois.
Adieu, Éternelle.En larme, elle se dit que si il la détestait peut-être qu’il aurait moins mal… Il n’y avait que lui, rien que lui.
VI
Réalité
Les parents de l’Éternelle découvrirent le corps de leurs fille, morte allongée sur son lit une lettre dans la main. Elle avait avalé l’adonidine* de son père qui le prenait pour son cœur.
La lettre avait été remit à Raphaël qui sut tout de suite qu’elle avait menti, il la connaissait trop bien…
L’autopsie dévoilera qu’elle était enceinte d’environs 3 semaines…
* Adonidine : alcaloïde qui vient d'une fleur qui s'appelle « Adonide de l'amour », utilisé pour les problème cardiaque.