Les Jeunes Ecrivains
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 Shelter.

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Mademoiselle K
Malicia
Corps Etranger
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Corps Etranger
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Masculin Nombre de messages : 14
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MessageSujet: Shelter.   Shelter. EmptySam 28 Juin - 15:38

Encore une fois, ça sent pas les oiseaux qui chantent et les violettes.
Mais je pense que c'est rempli d'espoir.
Shelter veut dire abri.
Shelter veut dire un truc griffoné vite fait dans la voiture, contre la vitre.
Les paroles en italique sont de Ray Lamontagne.

*

Invincibles.
C'est ce qu'on croit tous être. Immortels.
Parés pour l'avenir, armes de choc contre le destin.

Sur ce terrain je suis un Dieu, personne ne peut m'atteindre.
Le parquet glisse sous mes chaussures, j'entends le public hurler mon nom alors qu'il n'y a personne dans les gradins. Mes semelles crissent, course folle vers le but ultime, j'imagine face à moi des Titans, bouches ouvertes et ventres vides. Mes mains moites, le ballon qui se balance, les veines de mes poignets, les battements de coeur. C'est la ligne des trois points, ce truc que je ne réussis plus depuis des semaines, depuis l'accident. Je m'arrête face à cet arrondi, le blanc frappe ma rétine, je vais y arriver. La pointe des pieds, les bons appuis, mes doigts ne tremblent pas, je n'ai pas peur. Un drible, deux, un troisième pour la route. Les cris de la foule sont suspendus à mes phalanges, ils retiennent leurs souffles. Je vais vous prouver que rien n'a changé. Un saut, maîtrisé. Le ballon s'envole, frappe le cadre en verre, s'enroule doucement autour du panier, le taquine, les filets frétillent, mon sang bout, mes tempes dansent, mon maillot trempé et mes cheveux collés au front, si ça ne réussit pas j'arrête, si ça rate j'arrête, si tu tombes j'arrête. Le ballon titille encore une dernière fois le plastique du panier et. Se fracasse au sol.

Un simple souffle qui sort de ma bouche, je retire mon maillot mon nom au dos, je n'ai plus d'identité si je n'ai pas ce numéro. Pourtant le ballon roule au sol, lui aussi semble vouloir partir loin de moi, il roule si vite que je ne pourrais jamais le rattraper, mon maillot sur le banc des remplaçants, le numéro 21 comme ce jour où. J'essuie mes larmes et mon nez, tout à la fois, goût salé sur les lèvres, un signe de croix sur mon torse trop blanc, un dernier baiser, un dernier adieu. C'est mes mains sur les portes métalliques du stade, mes mains qui le ferme à jamais. La rue - le froid, les réverbères bancals, la lumière dégueulante de la Lune, les immeubles en face - m'accueille. La grande avenue, quelques boulevards, ma peau qui crève et je crois qu'il va neige, ce portail que je connais bien, l'escalade, une soudaine envie d'être empalé, un signe de main au gardien parce qu'il m'aime bien et que sa moustache est marrante.

Les morts me saluent aussi, Mme Ricaud et ses orchidées fanées, Mr Michelin et son marbre aussi vide que ses yeux sur la photo. Petit Antoine semble sourire encore, sa mère vient tous les jours, un paquet de réglisse rouge à la main, elle s'en gave en chialant, larmes à la fraise. Une fois elle a crié et ça m'a fait si mal que j'ai vomi mes tripes en rentrant à la maison - notre maison -. Je m'asseois face à toi, sur la tombe d'à côté Julien me balance sa veste. Il fume encore une de ses foutues cigarettes à la menthe qui m'empêchent de respirer, mais l'apnée près de lui, c'est toujours mieux que la morte lente sans ses silences. La fumée sous les étoiles, c'est comme une histoire qui se raconte, un signal qui dit à la Lune de se barrer parce qu'on veut être tranquilles avec toi. J'enfile la veste, mon nez se perd un peu dans le col, mon coeur me démange et je crève la dalle. Un bruit de zip, Julien s'asseoit sur les graviers, me tend un jambon-beurre, la tradition, qu'il dit.

C'était un Vendredi, ou peut-être un samedi.
On s'était quittés dans un baiser rapide, chacun son tour. On vivait tous les trois, une fille et deux garçons, on s'aimait à notre façon et on emmerdait les gens, les voisins, les trous du cul et les coincés. On s'était quittés dans un baiser rapide parce qu'on savait qu'on allait se revoir dans quelques heures, quand tu garerais ta Twingo pourrie en bas d'la rue, avec le sapin au citron qui ne sentait même plus pendant au rétro. Nous on te gueterait à la fenêtre comme deux affamés, parce que tu travaillais chez McDo et que tu ramenais de la bouffe gratos tous les soirs. Ce Vendredi, ce samedi peut-être c'était le dernier match de la saison, on devait marquer le coup, Julien et moi. Dans les vestiaires, y'a pas eu un mot échangé, rien. Juste les corps qui se dénudent pour enfiler la seconde peau, les derniers encouragements murmurés à soi-même, bien tassés sur le banc plus très solide. Quand l'arbitre a donné le premier coup de sifflet, Julien a pris ma main, il l'a serrée très fort, ses jointures ont craquer comme toujours, sa main tout ce qui m'importait. Notre meilleur match se déroulait devant les yeux ébahis de nos amis, pour une fois ils venaient nous voir jouer, mais nous tout ce qu'on voulait, c'était voir tes cheveux blonds dans le public, te voir t'agiter derrière ta bannière ridicule. 21h01 le panier final et la victoire et les cris et les cotillons et la musique trop forte - ta Twingo qui s'écrase contre un camion de marchandise - les félicitations des autres joueurs, les accolades de l'entraîneur - ta tête qui saigne contre le volant, les morceaux de pare brise dans le crâne -

Quand l'hosto nous a appelé, on a fait Paris en courant, on aurait pu monter sur les taxis, monter sur les toits, Yamakasi de l'urgence, anges de la vie venus trop tard. On a survolé les rues, Julien qui m'gueulait de me dépêcher, on est arrivés dans le blanc et l'éther, posant nos baskets sales contre un sol que ton corps inconscient avait foulé quelques minutes auparavant. Dans la salle d'attente on a vu le soleil se lever, les ongles de Julien qu'il crachait sautaient par la fenêtre, mes jambes semblaient mixer ton absence. Le toubib est venu nous voir, nous a parlé opération de dernière minute, extraction et perte de sang, electrocardiogramme et vie au bord du fil. Il nous a parlé de ta mort les yeux baissés et moi j'ai hurlé, hurlé comme jamais, hurlé comme la mère de Petit Antoine, hurlé pour tous ces matins où ton sourire nous donnait pas envie d'aller au boulot, nous donnait pas envie de servir des bourges qui ne disaient même pas merci, j'ai hurlé pour les petits mots sur le frigo, pour les coeurs que tu dessinais vraiment trop mal, pour ton corps mélangé aux notres quand mes étreintes avec Julien devenaient trop froides. J'ai hurlé et le toubib les infirmiers m'ont emmené, je me suis pas même pas débattu, de loin j'ai entendu Julien éclater la table en verre de la salle d'attente contre le mur.

21h01, notre vie s'est arrêtée.

- Tu vas attraper la crève.
- J'm'en branle Julien. J'ai toujours froid, de toute manière.
- Pas envie de payer un toubib.
- Ta gueule.
- J't'emmerde.


Julien prend ma main, on se lève, on s'allonge sur le marbre.
Au dessus de nos têtes, au dessus de nos fronts qui s'emmêlent, ton visage nous sourit et c'est comme si tu n'étais pas partie. Alors Julien, sous la Lune, l'odeur de la cigarette à la menthe, il chante et son souffle sent bon.

I guess you don't need it
I guess you don't want me to repeat it
But everything I have to give I'll give to you
It's not like we planned it
You tried to stay, but you could not stand it
To see me shut down slow
As though it was an easy thing to do
Listen when
All of this around us'll fall over
I tell you what we're gonna do
You will shelter me my love
And I will shelter you
I will shelter you


On ferme les yeux et la voix de Julien s'amoindrit sous mes baisers, et ta présence à l'intérieur de nos ventres, c'est.

Le meilleur abri du monde.
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Malicia
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Malicia


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MessageSujet: Re: Shelter.   Shelter. EmptyDim 29 Juin - 14:13

Je suis fan...

J'ai tout simplement adoré la sincérité et la beauté de ce texte. C'est maîtrisé, fluide, ton style est délié...
Bien joué.

EDIT : C'est vrai, comme cela a été dit dans le dernier commentaire, qu'il y a quelques maladresses et des petites fautes, mais je trouve que ça n'enlève rien au charme de ta plume ! Wink


Dernière édition par Malicia le Dim 29 Juin - 22:13, édité 1 fois
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Mademoiselle K
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MessageSujet: Re: Shelter.   Shelter. EmptyDim 29 Juin - 20:07

Crying or Very sad

Quelle maîtrise de l'écriture...J'aime beaucoup ta manière de retranscrire les sentiments...Vraiment, c'est super...
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cha-pline
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MessageSujet: Re: Shelter.   Shelter. EmptyDim 29 Juin - 22:11

Quelques petites maladresses et fautes mais dans l'ensemble, tres joli texte !
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Necrophage
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MessageSujet: Re: Shelter.   Shelter. EmptyDim 29 Juin - 22:20

Sur ce coup là je reste ébahit. Les maladresses?Très peu mais ce n'en sont pas vraiments pour moi disons qu'elles donnent une dimension plus...personelle au texte. C'est triste,enfin non c'est trop compliqué de définir ce que ton texte dégage,ce n'est pas de la tristesse,ni de l'espoir,ce n'est rien qui puisse se retranscrir en un simple post.

Je reste vraiment marqué par ton texte et personellement c'est mon coup de coeur du mois voir de l'année. C'est juste un texte riche en émotions,riche en qualitè. J'en veux encore plus,c'est super^^
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Ambre
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MessageSujet: Re: Shelter.   Shelter. EmptyMar 1 Juil - 2:00

Je ne sais pas comment te dire à quel point je suis fan.

Sérieusement, j'ai les larmes aux yeux, c'est vraiment magnifique. La façon dont tu es capable de nous faire ressentir les émotions, ça m'épate.

Bref, magnifique texte!
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Franck
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Franck


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MessageSujet: Re: Shelter.   Shelter. EmptyJeu 10 Juil - 8:18

Les deux sens de shelter prennent forme sur la fin. Je ne saurais trop quoi dire. Forcément, ce texte m'a plu aussi.
Une image serait peut-être plus parlante. Cette "dynamique" du texte et de l'histoire. Telle une balle qui rebondit sur le sol jusqu'à s'immobiliser. C'est un peu comme ça que j'ai ressenti l'histoire.
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MessageSujet: Re: Shelter.   Shelter. Empty

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