Les Jeunes Ecrivains
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 Mozart n'est pas mort

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Et-demain-matin
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Et-demain-matin


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MessageSujet: Mozart n'est pas mort   Mozart n'est pas mort EmptyLun 28 Avr - 20:25

(Voici une petite nouvelle que j'ai écrite il y a peu de temps. Pour un concours de nouvelles sur le thème de la rencontre. La fin est bâclée et l'histoire ne tient pas debout ^^ Tant pis ! Je vous livre le texte brut. Bonne lecture. )


J'ai cent ans aujourd'hui. J'ai cent ans et je meurs dans ce lit trop vaste pour moi. Oh, ne soyez pas triste. Je ne le suis pas moi-même. J'aurais vécu une belle existence. J'ai cent ans aujourd'hui et je sens la vie quitter mes veines. Cela me fait sourire. Combien d'humains naissent en cet instant où je m'éteins ? En une seconde, je cèderai ma place. En une seconde, tout changera. Je sais ce que vous pensez : en une seconde elle perdra tout. Non. Je ne perdrai que la vie. Tout le reste est éternel. J'ai cent ans aujourd'hui, et tout ce qui s'est passé pendant mon passage dans ce monde existera à jamais. J'ai cent ans aujourd'hui. Il me reste suffisamment de temps pour livrer mon dernier secret. Je sens l'ultime souffle se préparer et je dois révéler ce que j'ai tu si longtemps.

**********

Mozart n'est pas mort.
Je l'ai rencontré.

C'était une nuit dans une ruelle, il y a bien des années. Paris.

Dans ma jeunesse, mon plus grand plaisir était de marcher sans but dans les rues. La fraîcheur nocturne m'envahissait, c'est là que je vivais le plus. Rien ne m'appartenait, pas même mes pas. Ils décidaient de ma trajectoire comme des mains décident des mouvements d'un pantin. J'explorais le Paris endormi. Je m'explorais moi-même. Le rythme de mes pas était fonction de la musique qui me trottait dans la tête. En moi, je composais. Les notes se succédaient et disparaissaient. Je croisais ici un mendiant, là un noctambule perdu dans ses pensées. Il arrivait que je croise le regard de l'un d'eux. Il n'y a que là que des choses se passaient réellement au fond de moi. Le sentiment d'avoir des papillons dans l'estomac. Je voyais des symphonies dans leurs pupilles. Les notes dansaient autour d'eux. Je dansais avec elles.

Un mendiant étrangement vêtu s'approcha de moi cette nuit-là. Je ne voyais pas son visage mais quelque chose de rassurant se dégageait de lui. Sa démarche lente mais élégante me surprit. Son allure me fit oublier le ballet des notes. Etait-ce vers moi qu'il se dirigeait ? Désarçonnée, je me sentais ralentir et aller à sa rencontre. Son visage était caché derrière une épaisse chevelure blanche trop abondante et bouclée. Il se figea devant moi. J'en fis autant. Un frisson me parcourut. Je connaissais cet homme. Mais il m'était impossible de savoir qui il était. L'avais déjà rencontré ? De sa main aux longs doigts, il dégagea ses cheveux. C'est là que j'ai compris que jamais je n'aurais pu le rencontrer. Ses vêtements d'un autre siècle, son étonnante chevelure. Je le reconnaissais maintenant. Je l'avais déjà vu. Dans de vieux ouvrages de musique...

Ses petits yeux perçants fixaient les miens. Je ne pouvais en détacher mon regard. Ce petit homme devant moi m'empêchait de parler, de bouger. Ma respiration s'était coupée. J'entendais mon cœur battre à tout rompre dans ma poitrine. Ce visage familier faisait bien plus que m'interpeler. Je paniquais face à cet homme qui pourtant m'inspirait la confiance la plus totale. Que m'arrivait-il ? Mes jambes immobiles étaient désespérément engourdies. Leur raideur m'effraya. Un large sourire fendit son visage et découvrit une dentition naturellement parfaite. Mon corps redevint mobile. Une bouffée de chaleur s'empara de moi, j'aspirai l'air nocturne à pleins poumons, et ris aux éclats. Pourquoi avais-je paniqué ? Une lueur d'incompréhension traversa le regard du petit homme. Je m'aperçus que mon attitude n'était pas correcte. Qu'avait-il pensé en me voyant rire ? Gênée, je détournai le regard.
- "C'est donc vous."
Je ressentis un malaise qui s'évanouit aussi vite qu'il était né. Il me connaissait donc sans me connaître. « C'est donc vous. » Pourquoi dire cela à une inconnue ? Quelque chose m'échappait allègrement. Je risquais une réponse...
- "Me cherchiez-vous ?"
- "Depuis toujours."
Consciente de l'air idiot que je devais avoir pris en entendant cela, je tentai de me reprendre. Les idées fusaient dans ma tête. Et soudain, tout fut clair. Il m'attendait. Il avait une mission pour moi. Quelque chose que moi seule pouvais accomplir. Cela devait être important s'il avait attendu tout ce temps et traversé les siècles. Tout cela me parut absurde. Un moment de folie ? Cet homme devant moi venait du passé et prétendait qu'il m'attendait. Cet homme illustre, connu de tous depuis des siècles m'attendait. J'avais envie de rire. Je me pinçai.
- "Aïe !"
- "Je suis bien réel. Vous m'avez reconnu. Allons droit au but."
Il fourra sa main dans sa large poche et en sortit une liasse de feuilles jaunies et écornées. J'eus le temps d'entrevoir des portées remplies sur la première d'entre-elles. Il serra la liasse contre lui, comme s'il s'agissait d'un nouveau-né. Son regard se posa sur elle, ses yeux se firent tendres. Il soupira légèrement et me tendit les feuillets de son époque avec précaution.
- "Voici ma dernière sonate. Il n'est possible de la jouer que si l'on possède six doigts à chaque main. Vous possédez cette rare qualité et vous êtes fine mélomane."
Instinctivement, je regardai mes mains. Curiosité de la nature, le sort avait voulu que je naisse avec douze doigts. Un sixième doigt était déjà rare ; j'avais doublement cette anomalie. Deux doigts supplémentaires. Mes parents n'avaient jamais voulu que je sois opérée, j'avais donc dû subir le regard des autres toute ma vie. Mais cela ne m'avait pas affectée. J'avais tiré grand profit de cette polydactylie. Petite, j'avais été attirée par la musique, plus particulièrement par le piano. Il m'était devenu un atout de posséder cela. Je jouais tous les jours sur le petit piano désaccordé que nous avions dans le salon. Ma drogue quotidienne. Je devais avoir ma dose tous les jours. Avec la pratique, j'avais atteint un très bon niveau. Cependant, je ne souhaitais pas profiter de mes qualités de pianiste. J'aurais probablement intégrer un bon orchestre , et devenir musicienne professionnelle. Mais pour moi, le piano devait rester un loisir, un plaisir, et ne devait pas me permettre de gagner ma vie. Je faisais la différence.
- "En effet, j'ai douze doigts. Mais je ne suis pas seule."
- "Vous seule avez l'âme à jouer ces notes."
Ce ton péremptoire me fit esquisser une grimace. Que connaissait-il de mon âme ? Mon interrogation me parut stupide. Tout. Il devait tout connaître de mon âme puisqu'il m'avait attendue et choisie. Perdue, je réfléchissais en feuilletant avec le plus respect la partition manuscrite. Je lus sur la dernière page : W.A.M. – 1792.
- "1792..."
- "Sur ma tombe il est écrit 1791."
Il n'avait donc jamais quitté ce monde. Je me trouvais face à une légende historique.
- "J'ai besoin de vous. Cette sonate est parfaite. Il n'y a que vous qui puissiez traduire cette perfection. Jouez-la. Cette partition est désormais vôtre. Jouez-la. Persistez et n'abandonnez jamais. Je vous laisse libre de faire ce que vous souhaitez de ma Sublime. Je l'ai appelée ainsi. Ma Sublime. Je vous demande simplement de conserver le nom que lui ai donné."
Il tourna alors les talons et s'en alla. Je restai là, perplexe, les feuillets anciens entre les mains. Je fis un pas pour le rattraper, mais il avait déjà disparu à l'angle de la ruelle.
La lune éclairait la ville d'une lumière bienveillante. Je rentrai chez moi en courant, le plus vite possible. Je n'ai pas souvenir d'avoir un jour couru si vite. Une fois à la maison, je me jetai sur le piano, essoufflée, trempée de sueur et heureuse. Je plaçai la partition sur le piano et m'installai sur le tabouret. Au beau milieu de la nuit, je voulais jouer. Jouer jusqu'à en mourir. Je voulais découvrir la succession des notes que m'offrait la Sublime. Devant le piano, je tentai de me concentrer. Mais j'étais bien trop excitée. Riant, hoquetant, mes doigts ne pouvaient se résigner à caresser le clavier en cet instant. Trop d'émotions me submergeaient et j'étais incapable de risquer une mauvaise entrée en matière.

Je me réveillais le lendemain matin, assise sur le tabouret, la tête sur le piano. Dormir m'avait calmée. J'emportai la partition dans ma chambre et la lus avec attention. Sublime. Certains passages m'étaient obscures, d'autres s'imprégnaient en moi. J'étais époustouflée. Il me fallut un mois avant de me lancer sur le piano. Je n'imaginais pas comme cela serait laborieux. Note après note. Travailler, travailler encore, sans relâche. Jouer, jouer toujours. Recommencer dès que possible. Des heures. Des heures. Des jours. Des mois. Des années... Je gardais pour moi La Sublime. Parfois un voisin me demandait quel était le compositeur de cette merveille qu'il entendait régulièrement.
- "Un ami", répondais-je toujours. "Un ami..."
Oui, en quelques minutes, ce petit homme était devenu mon ami. Celui dont je ne pourrais jamais parler de l'existence à personne sans craindre que l'on me croie folle. Un ami qui m'avait probablement donné ce qui lui était de plus précieux. Quelque chose qui n'avait pas de prix.

C'est à l'âge de soixante treize ans que j'ai su jouer la sonate. Il m'avait fallu cinquante ans et douze doigts pour jouer la Sublime. Pour jouer la perfection. Je connais chaque note, chaque potée, chaque temps. Les pages entières sont gravées en moi. Je meurs, je n'ai plus besoin de la partition.

Mozart n'est pas mort. J'en ai la certitude. Il veille sur Sa Sublime, j'en suis convaincue. Mozart, je l'ai rencontré. J'ai respecté ma promesse. Sa Sublime a vécu.

**********

J'ai cent ans aujourd'hui. Et je vous ai livré ce secret qui m'a accompagnée pendant quasiment toute ma vie. Aujourd'hui, je passe le flambeau. La polydactylie étant héréditaire, j'ai bon espoir qu'un descendant puisse jouer La Sublime à son tour et vivre les instants uniques que j'ai pu vivre grâce à elle. C'est le souhait qui accompagne mon dernier souffle. Transmettre cela.

**********

J'ai eu cent ans aujourd'hui. La vieillesse m'a emportée. Restera La Sublime.
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MessageSujet: Re: Mozart n'est pas mort   Mozart n'est pas mort EmptyLun 28 Avr - 22:01

Et-demain-matin a écrit:

Certains passages m'étaient obscures, d'autres s'imprégnaient en moi.
Je connais chaque note, chaque potée, chaque temps.

Petites fautes de frappe que j'ai trouvees, il y avait aussi un endroit ou il manquait le mot 'grand' quelque chose genre 'le plus x soin' mais je ne trouve plus le passage... Neutral

Et-demain-matin a écrit:
J'ai cent ans aujourd'hui. Et je vous ai livré ce secret qui m'a accompagnée pendant quasiment toute ma vie.
Je pense que cet element de la deuxieme phrase est le seul qui ne va pas avec le ton du texte .. Tu pourrais aussi joindre ces deux phrases vu que tu ecris 'et' entre deux.

J'ai enormement aime ce texte Very Happy Il est simple et sincere, vraiment tres bien narre...
Je pense que le seul moment ou je ne suis pas vraiment rentree dans l'emotion c'est quand l'heroine commence a paniquer face a Mozart.. seul passage qui me semble un peu exagere..
La fin est tres bien Smile Je ne sais pas quoi dire d'autre a part : tres bonne ecriture, Continue !! Tu as du talent.
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MessageSujet: Re: Mozart n'est pas mort   Mozart n'est pas mort EmptyLun 28 Avr - 23:14

J'aime beaucoup, moi aussi, ce texte! Je trouve l'histoire originale (elle me fait penser à celles de Maupassant) ... Et tu la manies très bien! Par contre, j'ai eu un petit problème au niveau de la chronologie, je n'arrivais pas beaucoup à me repérer. À la fin tu dis "C'est à l'âge de soixante treize ans" et puis juste après "cinquante ans" donc j'avoue que je me suis un peu embrouillée! Mozart n'est pas mort 529661
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MessageSujet: Re: Mozart n'est pas mort   Mozart n'est pas mort EmptyMer 30 Avr - 12:53

Pour les quelques faute je m'excuse, je déteste me relire ! En tout cas merci de me les avoir signalées ! Very Happy

Pour la chronologie, entre les 73 et les 50 ans, je m'explique, en effet, ce n'est pas très clair. La vieille femme raconte une histoire qui lui est arrivée alors qu'elle avait 23 ans. Elle réussit à jouer la sonate 50 ans après ("Il m'avait fallu cinquante ans"), soit à l'âge de 73 ans (C'est à l'âge de soixante treize ans).
Je ne sais pas si tu te repères mieux, maintenant ...
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MessageSujet: Re: Mozart n'est pas mort   Mozart n'est pas mort EmptyMer 30 Avr - 23:47

Je ne dirais qu'un seul et unique mot pour qualifier la qualité de se texte: DlaBalle!...hum...superbe^^
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